Jacques Chirac, le Patrimoine et l’Environnement

Chacun a son opinion sur le président Jacques Chirac. D’aucuns le voient en « petit père du peuple », proche des gens et empathique, les autres ne lui pardonnent pas les « affaires » qui l’ont conduit au soir de sa vie devant les juges.

Bien entendu nous ne nous immiscerons pas dans l’intime conviction de nos compatriotes qui, pour le quart d’heure en tous cas, ont oublié sa faible popularité de fin de mandat pour en faire, dans les sondages post mortem, quasi l’égal du fondateur de la Cinquième République.

Les relations de Jacques Chirac avec le patrimoine historique avaient mal commencé. Jeune secrétaire d’État, il avait acquis avec son épouse en 1969 le Château de Bity dans la commune de Sarran en Corrèze et l’avait fait classer Monument Historique presque aussitôt. Le président Pompidou avait vivement réagi : « quand on prétend faire de la politique, on s’arrange pour ne pas avoir de château, sauf s’il est dans la famille depuis au moins Louis XV » avait il asséné. Le Canard Enchaîné l’avait alors baptisé « Château Chirac » et se servit ensuite de cette appellation pendant de nombreuses années.

Cet épisode en forme de comédie ne doit pourtant pas faire oublier que le « règne » de Jacques Chirac a été marqué par de grandes dates qui ont eut leur importance dans l’Histoire du Patrimoine et de l’Environnement

Le 2 juillet 1996 c’est Jacques Chirac, président de la République, qui a promulgué la loi instituant la Fondation du Patrimoine, portée par le gouvernement Juppé et le ministre de la Culture Douste Blazy.

Le premier août 2003, c’est encore lui qui a promulgué la loi dite « Aillagon » sur le mécénat, une loi que certains voudraient détricoter cette année.

Le premier mars 2005, après le fameux discours de Kyoto (…la maison brûle…) rappelé ces jours si par tous ses laudateurs, il a encore promulgué la loi constitutionnelle qui a fait entrer la Charte de l’Environnement dans le préambule de la Constitution. Chacun le sait, le conseil Constitutionnel, peu de temps après, a donné à cette charte une valeur constitutionnelle directement applicable et a rendu de nombreux arrêts à partir entre autres du fameux article 7 qui institut pour tout citoyen un droit à la consultation et a l’information sur ce qui concerne son environnement et son cadre de vie.

Rappelons que le 31 janvier 2002, au cours de sa seconde campagne présidentielle, il avait reçu à Provins considéré comme un lieu symbole, les présidents des associations qui devinrent par la suite le « G8 Patrimoine ».

Certes, les ministres de la Culture nommés après Jean Jacques Aillagon ne resteront pas tous dans l’Histoire, mais ses collaborateurs directs à l’Elysée recevaient volontiers les acteurs du Patrimoine.

Faut-il encore rappeler que c’est à lui que nous devons Le Centre Pompidou. Votre serviteur ne fait pas partie de ceux qui sont des adeptes de ce type d’architecture : le Canard Enchaîné ne titrait-il pas, la semaine de l’inauguration, sous une grande caricature de l’immeuble : «  les commodités sont à l’extérieur » ! Mais je suis bien obligé de reconnaître que ce monument a accueilli 3 551 344 personnes en 2018. Quant au Musée des Arts premiers du Quai Branly, il accueille 1 500 000 visiteurs par an.

On dira donc ce que l’on voudra, mais l’Homme politique qui disait n’aimer que la musique militaire et ne lire que des romans policiers avait bien caché son jeu.

L’archevêque de Paris dans son homélie à Saint-Sulpice a pu le citer dans un discours de 1980 adressé au pape Jean Paul II en visite à Paris : « C’est en ces lieux, sous le commandement des tours de Notre-Dame, à portée de la chapelle où Saint-Louis a honoré la Passion, au pied de la Montagne sainte-Geneviève où flotte encore le souvenir de l’antique bergère de Nanterre, patronne de la capitale, sous le regard de la prestigieuse Sorbonne où tant de docteurs ont enseigné, c’est en ces lieux que la France sent le plus fortement battre son cœur ».

Dommage que ce personnage complexe ait oublié ce qu’il avait dit ce jour-là lorsqu’il s’est agi de mentionner les racines chrétiennes de l’Europe dans le traité organisant l’Union…